SGL 1 Un cercle de sociabilités lorientaises dominé par la marine militaire

 

1 / 1   Un cercle de sociabilités lorientaises dominé par la marine militaire.

  Des hommes liés à la passion géographique par une association libre et volontaire : un cercle de sociabilités élitaires, un lieu de sociabilités savantes

1 Un cercle de sociabilités dominé par la marine militaire de 1882 à 1896

2 Le moment de la haute bourgeoisie entrepreneuriale lorientaise de 1896 à 1912

3 Le retour de la marine militaire de 1912 jusqu’à la dissolution de la Société Bretonne de Géographie

 

1 Un cercle de sociabilités dominé par la marine militaire de 1882 à 1896.

11 Le bureau de la Société de géographie bretonne est exclusivement composé de militaires en 1882

Le bureau de la Société de géographie bretonne est exclusivement composé de militaires en 1882, à l’exclusion du maire de Lorient :  Président d’honneur, Le vice-amiral Amet, qui fut pendant 18 mois à partir de 1882 commandant en chef et préfet du 3e arrondissement maritime à Lorient. C’est donc un personnage considérable qui fait office de référence tutélaire.

Remarqué pour son courage et son sens du commandement au fort de Montrouge incessamment bombardé par l’artillerie allemande dans les combats de 1871, puis chef d’escadre et admis au Conseil d’Amirauté à Paris, on lui reconnaît également une intelligence très vive et une érudition profonde.

Suivent toute une série de personnages liés à la marine : Gaulthier de la Richerie , capitaine de vaisseau en retraite, ancien gouverneur de Tahiti et de la Nouvelle-Calédonie;  Vice-Président , Le Prédour, inspecteur en chef de la marine ; Secrétaire général, Quoniam, Lieutenant colonel d’infanterie en retraite; Secrétaires adjoints, Martret de Préville, lieutenant de vaisseau et Salles, élève commissaire de la marine.

Un seul civil apparaît dans le bureau de la Société en tant que Vice-Président :  Adolphe Rondeaux, Maire de Lorient. C’était le moins que la marine pût faire.

La géographie est donc au service de la défense du territoire et de la conquête coloniale

 

Les fonctions administratives subalternes sont confiées à des non-militaires : Trésorier, Baumal, libraire; Archiviste, Debled, Conservateur de la bibliothèque de marine, encore que rien n’exclut que ce conservateur ait lui-même été un militaire.

 

Bulletin de la Société Bretonne de Géographie, Baumal, Lorient, n° 1, 1882 © Source gallica.bnf.fr / BnF

 

Des membres adjoints, un directeur des constructions navales, deux capitaines de frégate,  un médecin principal de la marine, un lieutenant colonel d’artillerie de marine,un Commissaire-adjoint de la marine, un capitaine d’infanterie, bref, une prédominance quasi-totale de la marine et aucune femme, tout ceci à mettre en relation avec le portefeuille ministériel dont l’intitulé est Ministère de la Marine et des Colonies.

Les présidents et vice-présidents donnent une aura certaine à la Société de par les fonctions qu’ils exercent, un préfet maritime vice-amiral, un ancien gouverneur, le Maire de Lorient. Pas de présence de négociants dans ce bureau, très peu de civils, des aristocrates et des roturiers choisis pour leur maîtrise intellectuelle. En outre, le siège social de la Société est situé au départ dans la Bibliothèque de la Marine, puis au 35 rue du Port à Lorient.

 

Toute cette monosociété géographique est renforcée par le fait que le nouveau membre doit être parrainé par deux personnes membres de la Société Bretonne de Géographie. Il est donc difficile d’y entrer et le choix par cooptation favorise le groupe socio-professionnel dominant, celui de la Marine à Lorient dans les années 1880.

Ceci est confirmé par la liste des présidents de la Société. C’est un capitaine de vaisseau, Gaultier de la Richerie, qui est le président des quatre premières années, de 1882 à 1886. Lui succède un Inspecteur en Chef de la Marine, Le Prédour de Kerambriec pour les années 1886 à 1889. En 1889 c’est un colonel d’artillerie de Marine, De Poyen Belle-Isle qui prend les rênes de l’Association Bretonne de Géographie. On croirait lire la liste des membres de l’Académie de Marine de Brest au XVIIIe siècle. C’est encore un marin qui lui succède en 1893, mais sans consonance aristocratique: Marquer, capitaine de vaisseau.

Les premières conférences sont surtout le fait de militaires comme la Séance publique du 4 Janvier 1884 . – Conférence sur l’ILE DE TERRE-NEUVE, par M. MARQUER, lieutenant de vaisseau
1884 Obock, possession française dans la mer Rouge, pr M. Lallemand, Lieutenant de Visseau

Elle compte 75 membres en 1882, chiffre qui passera à 200 dès l’année suivante, et consacre 5% de son budget à acheter dès la première année des livres et des cartes. Le Bulletin paraît tous les deux mois, et se subdivise en trois : conférences et travaux de recherche, Comptes-rendus et bibliographie, Nouvelles géographiques venant du monde entier, c’est-à-dire une veille stratégique permanente.

Particularité originale, elle possède en son sein, outre le bureau, un Conseil central, dont les sociétaires demandent à ce qu’il passe de X   à 20 membres. Elément significatif, un négociant est agréé : Léopold Guillotaux, puis on assiste peu à peu à l’entrée d’autres milieux professionnels que celui de la marine, celui de l’ancien sous-préfet de Lorient Adolphe Rondeaux, d’un banquier, Georges Ouizille dès 1884.

L’élargissement demandé du Conseil central s’ouvre au Directeur des constructions navales, à un Professeur d’histoire au Lycée, Le Marec, à un avocat ami de François Jégou, Du Boutiez de Kerorguen, à un autre banquier Sellier et à deux négociants : Marsille et Guillotaux.

Les travaux de recherche sont lus en séance publique le 1er vendredi du mois si le Conseil en décide ainsi.

Les réunions ont lieu à la salle d’asile de Lorient

Dès 1884 la Société participe à la réunion des Sociétés savantes de la Sorbonne, sur invitation du Ministère de l’Instruction publique, c’est-dire si la qualité de ses membres et de leurs travaux est appréciée par le pouvoir républicain.

Lutter contre le centralisme parisien et sauvegarder sa spécificité

12 La présence de civils influents, mais qui ne disposent pas de place dans le bureau de la Société

1883 72

Membres , outre les traditionnels militaires – de la marine ou d’autres armes en passant du lieutenant de vaisseau au capitaine d’infanterie jusqu’au contre-amiral – on note la présence de médecins, de propriétaires, de magistrats comme le substitut du procureur de la République Hédal,  des banquiers Pitre-Latour le Directeur de la Société générale

La liste des membres met en évidence le choix du personnage référence qui est Ferdinand de Lesseps, président d’honneur. En dehors du bureau, la Société compte 107 membres, qui sont représentatifs des élites lorientaises, on y trouve toujours pour l’essentiel des militaires de la marine qui représentent plus de 60 % des effectifs dont deux trésoriers Amiet et Berthelot du Chesnay , le sous-préfet de Lorient,

des négociants – Dufilhol Edgard et Paul, Marsille, Méry Le Beuve, Ouizille, des professions libérales, des banquiers – Souvanet, Sellier, le directeur de la Banque de France à Lorient, de Beauval, un sous-préfet, Dessaud, des médecins, Poitou-Duplessy, Bodélio,

un pharmacien, Joubaud,  un photographe, Fessard, un libraire Baumal, des avocats dont Du Bouëtiez de Kerorguen, un greffier du tribunal , le directeur des constructions navales, Perroy, le directeur du journal Le Morbihannais Chamaillard,

le président de la ligue de l’enseignement, Esmiol, et des employés – un caissier au crédit lyonnais,Véron, un caissier de la caisse d’épargne, Callot, un bibliothécaire de la marine, Debled, des professeurs de géographie , Bureau, un professeur d’histoire, Le Marec, un professeur d’hydrographie, Fournier, l’aumônier du lycée, l’abbé Perrin, un sous-inspecteur des forêts, Guieysse, que des hommes.

Le président de la Société souligne que »nos premiers travaux se sont portés vers des contrées lointaines que beaucoup de nous ont visitées ou habitées, que plusieurs iront voir ou revoir suivant les chances de leur carrière. Et parmi ces contrées lointaines, celles où flotte notre drapeau ont particulièrement attiré notre attention. »

Il n’y a pas que des lorientais :  Kerviler comme intervenant 1883-1893 en devient membre en 1884.

Des femmes font également partie de la société comme la regrettée parce que décédée dès 1883 Sophie de la Richerie, fille du Président en exercice et épouse de M. Sévène. Nous apprenons à cette triste occasion que des groupes de jeunes filles et de jeunes femmes assistaient aux réunions mensuelles de la Société bretonne de Géographie de Lorient. On compte parmi les membres officiellement inscrits Mme Besné, épouse du négociant du même nom, les couples étant tous les deux membres, comme Mme Brossard de Corbigny, épouse d’un capitaine de frégate, Mme Pierre de la Rouvière, également épouse d’un capitaine de frégate

Des femmes seules figurent sur la liste : Mme Schwérer, mais il n’y en a qu’une en 1884. Sur 200 membres on compte donc quatre femmes.

Une Société qui choisit une géographie qui se veut englobante « Elle ne peut rester indifférente aux intérêts moraux et matériels des sociétés humaines, dont elle suit le développement sur toutes les parties de la terre. Les attributions de la géographie s’étendent à tout ce qui intéresse le genre humain. »

1884 339 liste des sociétaires, au 1er janvier 1884 226 sociétaires.

 

13 Les finalités de la Géographie selon le Secrétaire général de la Société 1882,3, 248

Efforts du génie civilisateur pour faire pénétrer partout les lumières du progrès

Arracher à la nature les secrets qu’elle cache sous les glaces du Pôle ou sous les brûlantes ardeurs du soleil équatorial

Perçant des isthmes, creusant des tunnels pour abréger les distances, faciliter les relations entre les peuples

marche ainsi plus rapidement vers la réalisation du rêve de concorde et de liberté

La géographie est une science assez large pour que chacun suivants ses goûts puisse y trouver des satisfactions intellectuelles plus autres éléments préjugés

H.de BIZEMONT, Capitaine de frégate, ouvre par un exposé remarquable en citant tour à tour chaque région du globe en s’appuyant sur les principaux voyages d’exploration en cours d’exécution sur les différents points du globe.

De l’Europe, il y a peu à dire, sauf la topographie qui doit rectifier quelques traits cartographiques, notamment dans la péninsule des Balkans. L’ethnographie peut faire de curieuses recherches sur les races si diverses. La géographie physique des mers, science nouvelle dont les fondateurs sont les Wyville Thomson commence à scruter les profondeurs des océans ; l’étude des courants , la  température des eaux, de la vie végétale et animale sous-marine.

Le tunnel sous-marin entre la France et l’Angleterre en  voie de construction, restent 35 km à creuser, le percement de l’isthme de Corinthe.

Afghans le protectorat militaire de l’Angleterre

L’Indo-Chine, notre belle colonie Une population dense et laborieuse attend avec impatience d’être délivrés du joug des mandarins. M. Courtin dressent une carte des régions parcourues? Peu de voyageurs ont pu s’échapper de la côte.

Les expéditions du Sud-oranais concerne les curieux monuments mégalithiques. L’attaque désastreuse du capitaine témoigne des difficultés à entreprendre.

Prise de possession d’Obock et tenue non sans mal.

Roi belge a encouragé la construction de stations hospitalières sur la rive du lac Tanganyika, où les pères de la mission n’ont pas la vie facile.

Stanley creuse une route et Livingstone suit le grand fleuve Congo.

Savorgnan de Brazza remonte l’Ogooué, rencontre un nouveau fleuve mais le tamtam des Apfourous retentit, moeurs difficiles . Gain par Brazza qui retourne en France..Retour, paix avec les Apfourous, on lui donne le nom de Brazzaville.

La sénégambie

Capitaine Galliéni 1880 pkllés paf Bambaras, libéré au bout d’un an mais droits exclusifs de navigation sur le Niger.

Le  lieutenant Colonel Borgnis-Desbordes faisaient l’étude du chemin de fer pour réunir le Sénégal au Niger par Kayes jusqu’à Bamako.

Dr Bayol, la capitale du Foutah – Djallo admirablement située pour commander la route jusqu’à l’océan

Désiré Charnay cherche ruines à Palenque au Yucatan

Equateur , percement de l’isthme de panama…encore. Bâtiments pour ouvriers à lire

Dr Crevaux Médecin de la Marine, voir ses exploits

Océanie Australie pas livré tous ses secrets, Nouvelle-Guinée mystérieuse

La Jeannette disparue 1881 coule survivants La Lena

Année 1882, plusieurs expéditions vers régions polaires Partage liste

La géographie est une science assez large pour que chacun suivants ses goûts puisse y trouver des satisfactions intellectuelles plus autres éléments préjugés et autres

 

14 Une société qui s’ouvre à d’autres disciplines

Conférence sur la Préhistoire 1883 163

Les français en Indochine jusqu’à la Révolution  A Septans

1884 1885 Et sur des organisations L’Alliance française, L’Association libre de la jeunesse française

1886 Les sociétés savantes et le centenaire de 1789

1886 Un légat du pape à Pékin Martineau des Chesnez

1886 La géographie et les humanités

1886 Lorient et les grandes compagnies maritimes au XVIIIe siècle Deloncle

1886 Lorient et les ports de commerce au XIXème siècle Marsille

 

 

2 Le moment de la haute bourgeoisie entrepreneuriale lorientaise de 1896 à 1912

Il faut attendre 1896 pour qu’un changement socio-professionnel se mette en place, l’élection du négociant et armateur Dufilhol. Celui-ci restera très longtemps en place, de  1896 à 1912, symbole de l’orientation commerciale du port de Lorient dans un cadre colonial, mais les signes avant-coureurs de la première guerre mondiale font que c’est à nouveau un membre de la Marine qui lui succède à la présidence en 1912

Marsille et le commerce extérieur 1883 274 citant JJ Rousseau « Ce ne sont pas les murs qui font la Patrie, ce sont les lois, les moeurs, le commerce. Ce dernier lien est le plus puissant de tous parce qu’il provoque et agrandit les relations entre les peuples, parce que le commerce est basé sur les échanges, parce qu’il repose sur l’intérêt. »

1898 Statuts de la Société Bretonne de Géographie, révisés en 1898

 

Etude locale

1884 1885 Exposé historique et statistique des épidémies du Choléra asiatique dans le Morbihan Dr Alphonse Mauricet de  1832 à 1865

1900 L’année coloniale Olivier (les maux de la colonisation)

3 Le retour de la marine militaire de 1912 jusqu’à la dissolution de la Société Bretonne de Géographie

Jouan, Ingénieur hydrographique en chef de la Marine, qui restera à son poste pendant toute la guerre et les années suivantes jusqu’en 1922. De 1922 à 1935, c’est un ingénieur hydrographe en chef de la Marine, Florian La Porte, X 1875, a fait campagne au Tonkin en 1886  qui préside aux destinées de l’Association,  et enfin le Général Joalland à partir de 1936, qui a fait ses études au Lycée Dupuy-de-Lôme à Lorient, et a mené de nombreuses missions en Afrique, prenant notamment Zinder et la capitale du royaume du Kanem.

 

 

 

En dehors de la parenthèse qu’était la présidence du  négociant Dufilhol, c’est bien la Marine militaire qui exerce la plus grande influence au sein de la Société Bretonne de Géographie. Dès que la présence de la marine s’affaiblit, on note des intervenants divers comme René Saib, Madeleine Desroseaux.

 

 

SGL 1 Un cercle de sociabilités lorientaises dominé par la marine militaire