4. De simples affleurements à la surface du sol ?

4 De simples affleurements à la surface du sol ?

41 Le résultat d’une érosion ?

La description qu’en fait Mahé pourrait s’interpréter comme le résultat d’une érosion
«Trois hauteurs ont cela de particulier qu’elles sont plus chargées que le reste de la plaine et que les blocs y sont entassés pêle-mêle et dans le plus grand désordre (51) ».
Cette hypothèse, Mahe ne l’envisage à aucun moment : ce sont des hommes qui sont à l’origine de cette édification de monticules de pierres, et non le spectacle d’un chaos rocheux.
La photo ci-dessous faite lors d’une recherche sur le terrain avec Philippe Gouezin montre un affleurement à la surface du sol à l’est de la forêt de Brambien. Est-ce ce type de bloc que Mahé et ses contemporains qualifiaient de mégalithe ?

LE SILENCE DES PIERRES DISPARUES

Le chanoine rapporte que «Le lit du ruisseau de Brambien est lui-même coupé par de grosses pierres (52)». Il peut s’agir d’un simple chaos granitique comme on peut en voir dans le Sidobre.
La description qu’en fait Mahé, les plus gros blocs étant situés sur les hauteurs, correspond à la formation d’un espace où l’arène granitique a progressivement été emportée par le ruissellement, laissant à l’air libre les blocs de granite arrondis par le processus de circulation de l’eau dans les diaclases. Ces blocs se retrouvent de par la disparition de l’arène granitique les uns sur les autres, ceux du sommet formant un chaos dit de château-fort et les autres un chaos de pente. L’espace représenté par Mahé pourrait être la résultante de cette évolution géologique.

42 Une confusion mégalithes/ blocs rocheux courante.

La revue Sciences Ouest en rapporte un exemple «Après l’incendie du 22 juin 2003 à Belz (Morbihan), un prospecteur en archéologie locale fait le croquis de dix menhirs inconnus. Hélas, quand il revient quelques jours plus tard, les blocs, confondus peut-être avec de simples cailloux, ont été déplacés ! (53) ».

43 Un exemple de confusion possible : un amas rocheux près de Kerlaure ou un amoncellement d’éléments mégalithiques détruits ?

Le lieu-dit Kerlaure est situé au nord-est du village de la Bande. Il est très proche, deux cent mètres environ, de l’ensemble de menhirs appelé Menhir du Bonnet rouge.
Entre les bâtiments d’exploitation et les menhirs, on note la présence d’un espace quadrangulaire recouvert d’arbres comme en attestent les photographies aériennes prises en 1977 et en 2012. Cet espace a récemment été déboisé. Un amoncellement de pierres a été mis à jour par le travail effectué. Peut-on en conclure qu’il s’agit d’un espace relique tel que Mahé et ses successeurs l’ont décrit ou s’agit-il de roches déplacées par les exploitants successifs des terrains alentours et empilées sur un espace réduit ? Un certain nombre de ces rochers donne l’impression de la marque d’une intervention humaine, mais selon Philippe Gouezin, ce sont des roches naturelles et quand bien même elles auraient pu avoir une origine autre, il serait bien difficile de le déceler.

Peut-on rapprocher ces pierres de la description de Cayot-Delandre en 1847 : «Il est impossible de rendre l’aspect de ces innombrables pierres en désordre,pêle-mêle, debout ou renversées (54) », ou de celles de Fouquet : «Sur tous les points et particulièrement entre la forêt de Mesny, la forêt de Couetzo et celle de Brambien, on ne trouve que monuments détruits pierres levées ou renversées, sans noms et sans destinations connues mais dont l’ensemble présente à l’oeil étonné un spectacle étrange (55) », soit exactement l’espace qui englobe Kerlaure. Au nord-est du bois de Mesny, ajoute-t-il«gisent d’énormes masses de pierres, qui ont été jadis des autels et des menhirs ; mais la destruction a passé par là, comme ailleurs et même plus qu’ailleurs, si bien qu’il faut une grande attention et une grande expérience pour reconnaître à tant de débris leur destination première (56)». La dernière scène décrite par Fouquet est située non loin de Kerlaure, à quelques centaines de mètres au nord-est.
Il faut noter qu’un peu plus à l’est de cette zone, deux monuments mégalithiques ont été récemment découverts par Philippe Gouezin.


51  Joseph MAHE, op.cit, 1825, p.175.
52  Joseph MAHE, op.cit. 1825, p.176.
53  Nicolas GUILLAS, Soixante menhirs découverts in extremis, Une fouille exceptionnelle dans les landes de Belz, Sciences Ouest, n°236, Octobre 2006.
54  Alexandre CAYOT-DELANDRE, François-Marie, Le Morbihan, son histoire et ses monuments, Vannes, Cauderan, 1847, p. 298.

55  Alfred FOUQUET, Guide des touristes et des archéologues dans le Morbihan, Vannes, A. Cauderan,1854 pp. 63-64.
56  Alfred FOUQUET, Promenade archéologique sur la lande de Lanvaux, Bulletin de la Société Polymathique du Morbihan, 1861, p. 50.

4. De simples affleurements à la surface du sol ?